La Commission des Nations unies pour le droit des affaires ( UNCITRAL) a mis au point des lois modèles en particulier dans le domaine de l’insolvabilité.( Cliquer ICI) Ces lois sont ensuite « copiée » par différents pays ( peu ou beaucoup) afin d’avoir un cadre compatible( bien plus qu’harmonisé) . 56 pays ont adopté des lois compatibles basées sur les mêmes principes que le règlement européen ( lui même inspiré de la loi modèle). Les principes sont les mêmes: Compétence au COMI, procédures secondaires, coopération entre juges et praticien, reconnaissance automatique, mesures provisoires, loi applicable. En cliquant sur le lien, vous trouverez les travaux en matière de loi modèle, de loi Groupe, de pratique pour les PME, un guide pratique pour le juge, des recueil de jurisprudence, des vidéo, des colloques, le résultats des travaux.  Avec le GRIP nous participons à ces travaux. 56 pays ont adopté la loi Cliquez ici pour la liste 

Les États-Unis ont transposé la loi UNCITRAL à travers le Chapter 15 en 2015. L’introduction du Chapter 15 est une réforme majeure du droit de l’insolvabilité internationale aux États-Unis.

La reconnaissance de la procédure d’insolvabilité étrangère est la condition préalable, pour le représentant étranger, à son accès aux tribunaux fédéraux et aux tribunaux étatiques qui restent compétents pour de nombreux sujets En vertu de la règle 11 U.S.C. § 1504, la procédure est engagée par une demande de reconnaissance de la procédure étrangère. Les conditions de forme de cette demande sont régies par le 11. U.S.C. § 1515, c’est-à-dire, accompagnée d’une copie certifiée conforme de la décision étrangère faisant objet de la demande de reconnaissance, et/ou de la nomination du représentant étranger. Les obligations de fournir une documentation complètes et détaillée (dite obligation de révélation ou de disclosure) sont importantes. La compétence territoriale est régie par le 28 U.S. C. § 1410 qui prévoit qu’est compétent le tribunal du lieu où le créancier a son établissement principal au sens de la notion de COMI aux É.-U. ou la plus grande partie de son patrimoine. À défaut de l’un et de l’autre, est compétent le tribunal dans la juridiction duquel des actions en justice sont en instance devant un tribunal fédéral, ce qui est une application du test de connexion suffisante du droit anglo-saxon. À défaut, la procédure est portée devant le tribunal offrant les conditions de sécurité juridique les plus efficientes en fonction des besoins de l’affaire et des parties, ce qui explique le rôle des juges du district sud de New-York spécialisé en procédures internationales.

La définition des procédures susceptibles de reconnaissance se trouve à la règle 11 U.S.C. § 101(23) qui renvoie à la notion de procédure collective judiciaire ou administrative ouverte dans un état étranger, dans le cadre de laquelle les biens et les affaires du débiteur sont soumis au contrôle ou à la surveillance d’un tribunal. Il est indifférent qu’il s’agisse d’une procédure provisoire ou finale. La procédure peut être menée aux fins d’un redressement ou d’une liquidation. Les tribunaux de faillite américains analysent très précisément en fait et concrètement les procédures étrangères et examinent dans quelles mesures elles répondent à la définition[5]. Les tribunaux partent du principe que la reconnaissance de la procédure étrangère est la condition pour que le représentant étranger ait accès aux tribunaux américains, de telle sorte que cet examen est minutieux. Il porte sur le type de procédure, mais aussi sur le type de procédure d’espèce pour dénicher l’utilisation de procédures déjà reconnues mais instrumentalisées à d’autres fins. Il est nécessaire, pour la reconnaissance de la procédure, que le débiteur étranger remplisse les conditions du 11 U.S.C. § 109(a), à savoir un domicile, ou un établissement industriel ou commercial aux États-Unis, ou des actifs. Cette dernière condition est interprétée largement et de manière vague[6].  Le terme de « représentant étranger » est décrit au 11. U.S.C. § 101(24). Il peut s’agir d’une personne physique ou morale, habilitée à titre provisoire ou définitif, dans la procédure étrangère, à procéder à la réorganisation ou liquidation des actifs du débiteur ou seulement d’être le représentant de la procédure étrangère.Les conditions juridiques de la reconnaissance sont exposées au 11 U.S.C. § 1517 et sont pour une part « formalistes »[7] et pour une autre part sur des conditions de fond. La procédure est reconnue comme principale si la procédure dont la reconnaissance est demandée est principale dans le pays dans lequel le débiteur a son centre d’intérêts principaux, ou comme procédure secondaire si le débiteur a seulement une succursale des actifs ou des activités dans ce pays, 11 U.S.C. § 1517(b). Les discussions sur le COMI sont donc importantes en particulier face à des sociétés off-shore[8]. Les facteurs examinés par les tribunaux sont le siège administratif principal du débiteur, le lieu d’intervention des décideurs, la situation des actifs et biens, le siège des créanciers, l’applicabilité du droit pour les litiges résultant de la procédure, le lieu d’enregistrement[9]. Malgré la nature contradictoire des procédures d’insolvabilité, les tribunaux examinent la question du COMI du demandeur même s’il n’est pas contesté[10]. Les juges partent du principe que, pour la détermination du COMI, c’est le moment du dépôt de demande de la procédure étrangère qui est déterminant.[11] Dans une décision récente de la Cour d’appel (2d Circuit, New York), la Cour arriva à la conclusion que ce n’est pas le moment du dépôt de demande dans la procédure étrangère qui est décisif pour la détermination du COMI, mais le moment de la demande de reconnaissance de la procédure Chapter 15.[12] Selon cette décision, cette conclusion ne serait pas valable uniquement pour le cas où le moment de la demande aurait été choisi pour impacter le lieu du COMI.

La reconnaissance de la procédure étrangère est toujours soumise à la réserve du 11 U.S.C. § 1506, au titre de laquelle la reconnaissance peut être refusée lorsqu’elle serait manifestement contraire à l’ordre public des États-Unis. Cette restriction est soumise à une interprétation étroite[13]. Par exemple, dans la décision Ephedra Products[14], le fait qu’une Cour n’était pas à la disposition des créanciers, dans la procédure d’insolvabilité canadienne dont la reconnaissance était en question, ne fut pas considéré comme contraire à l’ordre public. Par contre, une procédure d’insolvabilité allemande ne fut pas reconnue, car contraire à l’ordre public[15] en raison du fait que le praticien allemand de l’insolvabilité avait fait une demande de reconnaissance afin d’imposer également aux É.-U. la remise au syndic du courrier du débiteur, ordonnée dans le cadre de la procédure allemande. Le tribunal refusa la reconnaissance de la procédure parce que la remise au syndic du courrier du débiteur aurait été manifestement contraire à l’ordre public des États-Unis qui protège le courrier. Le tribunal des faillites britannique, par contre, n’avait pas vu une telle contradiction de l’ordre public[16] pour le même sujet.

Les conséquences de la reconnaissance de la procédure d’insolvabilité étrangère en procédure principale sont régies par le 11 U.S.C. § 1520. Au titre du 11 U.S.C. § 1520(a), les §§ 361 et 362 sont applicables aux actifs du débiteur aux États-Unis. Le renvoi au § 362 est particulièrement important, puisqu’il implique l’application de la suspension automatique des poursuites, dite automatic stay. Sont donc interdits entre autres, au titre du § 362(a), l’engagement ou la poursuite de procès, l’exécution forcée, la saisie de biens, la constitution de garanties et la compensation. Ces actions ne deviennent à nouveau possibles que lorsque le tribunal les autorise par une décision § 362(d). Une exception importante à la suspension automatique des poursuites se trouve au § 362(b)(4) qui prévoit que cette suspension automatique des poursuites n’est pas valable pour les mesures de la police ou d’un organe gouvernemental, y compris les poursuites ou procès pénaux. Cette exception fut importante dans le cadre d’une procédure dont la procédure principale avait son origine en Allemagne. Le praticien de l’insolvabilité de la société allemande Quimonda AG avait importé aux É.-U. des appareils fabriqués par le débiteur déclaré en faillite. La société LSI Corp. avait, en avril 2008, prétendant que ces appareils renfermaient des pièces violant un brevet lui appartenant, porté plainte auprès de la United States International Trade Commission („ITC“) contre le praticien allemand de l’insolvabilité. En juin 2009, le praticien allemand de l’insolvabilité déposa une demande de reconnaissance de la procédure d’insolvabilité allemande selon le Chapter 15. L’ITC engagea une procédure à l’encontre de Quimonda. Le praticien allemand de l’insolvabilité invoqua avec succès la suspension automatique des poursuites.[17] Cette décision fut cependant annulée par le U.S. District Court de Eastern District of Virginia, qui avança que l’exception selon le § 362(b)(4) était applicable. [18]La reconnaissance autorise le juge à prendre des injonctions et d’autres ordonnances. Outre les conséquences de la reconnaissance régie par le 11 U.S.C. § 1520, le tribunal peut, au titre du 11 U.S.C. § 1521, prononcer d’autres ordonnances, et ce indépendamment du fait que la procédure étrangère ait été reconnue à titre de procédure principale ou secondaire. En vertu du 11 U.S.C. § 1520 (a), le tribunal, à la demande du représentant étranger, peut prononcer toute ordonnance adaptée, si nécessaire, pour contribuer à imposer la volonté du législateur ou protéger le patrimoine du débiteur ou les intérêts des créanciers. Sont mentionnées en particulier les mesures suivantes : Interdire de poursuivre des contentieux, dans la mesure où le § 1520(a) n’est pas déjà applicable ; Interdire des exécutions forcées ; Interdire des actes de disposition du créancier ; Ordonner des dépositions de témoins, ou admettre d’autres preuves concernant les biens, le patrimoine ou les actifs du débiteur, ses affaires, ses droits, obligations, engagements ou passifs ; Accorder le droit de disposer des biens, des actifs et du patrimoine du débiteur aux É.-U. ; Confirmer la protection provisoire des droits accordée en vertu du § 1519 ;Accorder tous autres droits et compétences de trustee, sauf exception pour le droit de recours. Pour les ordonnances provisoires entre la demande de reconnaissance de la procédure étrangère et la décision correspondante du tribunal, c’est le 11 U.S.C. § 1519 qui est la base légale et qui permet d’interdire des exécutions forcées ou procès à l’encontre du débiteur, d’habiliter le représentant étranger à faire faire des dispositions.[21]

Condition de réciprocité. En vertu du 11 U.S.C. § 1507, le tribunal peut également apporter un soutien plus ample encore. Pour cela, il est nécessaire que le tribunal s’assure que les principes de réciprocité soient préservés. Un traitement équitable des créanciers ou des parties intéressées doit de même être assuré. Une autre condition est que les créanciers domiciliés aux É.-U. soient traités sans préjugés et aient la possibilité de produire des créances dans le cadre de la procédure étrangère sans obstacles inutiles. De même, la procédure étrangère doit veiller à empêcher l’octroi d’avantages à certains créanciers et préserver les droits de contestation des créanciers, veiller à une répartition des biens et actifs essentiellement selon les principes en usage aux É.-U., et à ce que le débiteur ait – si ceci est approprié – la possibilité de proposer un redressement. Les tribunaux interprètent très largement ce texte. Une décision fréquemment citée sur ce point (§ 1521 et § 1507) est la décision In Vitro de la Fifth Circuit Court of Appeals.[24] In Vitro était une entreprise de production de verre au Mexique, qui disposait, lors de l’engagement de la procédure d’insolvabilité, de sites de fabrication dans le monde entier. La société mère au Mexique avait émis des titres de créances et les créances avaient été garanties par les filiales. La société mère au Mexique devint insolvable. Le plan de réorganisation de celle-ci prévoyait que les filiales non insolvables soient libérées de leur obligation de garantie. Les créanciers firent valoir leurs droits aux É.-U. Les fondés de pouvoir mexicains obtinrent la reconnaissance de la procédure mexicaine aux É.-U. selon le Chapter 15. Ils échouèrent cependant pour la reconnaissance du plan de réorganisation.[25] Le tribunal se pencha sur la relation, qu’il qualifia de « pas très claire », entre les §§ 1507 et 1521, et jugea qu’il convenait d’examiner d’abord si la protection juridique demandée était contenue dans les cas énumérés aux § 1521(a) ou (b). Si ce n’était pas le cas, le tribunal devrait décider si la protection juridique devait être accordée à titre de « protection juridique appropriée » en vertu du § 1521(a). Le point décisif était de savoir si le soutien demandé était déjà possible au titre de la section § 304 du Code de 1978 ou en raison d’autres dispositions légales. Si ceci n’était pas le cas, le tribunal n’aurait à examiner qu’en troisième lieu si la protection juridique demandée pouvait être accordée en vertu du § 1507, les conditions plus strictes de celui-ci devant alors être prises en compte. La reconnaissance du plan de réorganisation, selon lequel les sociétés non concernées par l’insolvabilité devaient être libérées de leurs obligations, fut refusée, car les règlements prévus par le plan ne correspondaient pas à une répartition prévue par le droit américain. Par la suite, les associés auraient été essentiellement les bénéficiaires du plan, au détriment des bailleurs de fonds, ce qui est en contradiction avec la règle de priorité absolue (absolute priority rule).

Une reconnaissance avec des limites. Une limitation importante des droits du représentant étranger résulte du 11 U.S.C § 1521 (a) (7), selon lequel il est interdit au tribunal – entre autres – d’accorder au représentant étranger la protection juridique en vertu des §§ 544, 545, 547, 550 et 724(a). Le représentant étranger ne peut obtenir ce droit que s’il mène lui-même une procédure d’insolvabilité complète conformément aux Chapter 7 ou Chapter 11, 11 U.S.C § 1523(a). Une autre limitation de la protection juridique est précisée par le 11 U.S.C. § 1522(a). Le tribunal ne peut rendre d’ordonnances selon les § 1519 et § 1521 que si les intérêts des créanciers et des autres parties intéressées, y compris le débiteur, sont suffisamment protégés. Une décision importante dans ce contexte résulte du cas cité Jaffe contre Samsung, qui concernait la solvabilité de la société Quimonda AG.[28] L’objet du litige dans ce procès était l’étendue du droit des faillites étranger lorsque celui-ci entre en conflit avec les normes du droit américain[29], en l’espèce le droit au brevet. Nous renvoyons à l’exposé fait ci-dessus. La démarche du praticien allemand de l’insolvabilité devrait être permise par une demande en vertu du 11. U.S.C. § 1521. Le tribunal des faillites rendit une décision à la condition cependant que les droits des preneurs de licence américains, conformément au § 365(n), ne soient pas lésés. Cette décision fut attaquée et l’United States District Court for the Eastern District of Virginia renvoya la cause au tribunal des faillites, lui ordonnant d’examiner si une limitation des droits es preneurs de licence du fait du § 362(n) constituait une atteinte à l’ordre public ou si les intérêts des preneurs de licence restaient suffisamment protégés au sens du § 1521(a). Le tribunal des faillites parvint à la conclusion qu’il y avait effectivement atteinte à l’ordre public. L’United States Court of Appeals for the Fourth Circuit mit en balance l’exigence de coopération dans les cas d’insolvabilité transfrontaliers et l’esprit et la finalité des dispositions du § 362(n), visant à maintenir la capacité d’innovation de l’économie. Le tribunal considéra que la protection des créanciers au sens du § 1522(a) ne serait pas une cause suffisante de protection si la résiliation des contrats de licence était concédée, et maintint la décision du tribunal des faillites. La cour d’appel ne vit cependant pas d’atteinte à l’ordre public. Cette décision fut saluée aux É.-U.[30]. La Cour suprême des États-Unis refusa une demande de réexamen de cette décision.[31]

La section 1504 du Chapter 15 reproduit le concept de la loi UNCITRAL de Rogien Main ou No main Proceeding, la seconde étant celle qui n’est pas ouverte dans le pays du COMI[32], la seconde ne bénéficiant pas du sursis automatique[33]. L’action de reconnaissance doit être engagée par le « Foreign representative[34] » pour une procédure répondant au critère de la « Foreign Proceeding [35]». Un premier cas à examiner est celui où le juge constaterait que le scheme concerne un débiteur « solvable ». Le critère du §101 (23) est que la loi qui crée la procédure est relative à l’insolvabilité ou un ajustement de la dette, que la juridiction étrangère contrôle ou supervise les actifs et que le but soit une réorganisation ou une liquidation. Les juges américains ont admis qu’un scheme est relatif à une loi sur l’insolvabilité, car le débiteur réduit et élimine des dettes, ce qui est dans le concept de la loi relative à l’insolvabilité[36]. La procédure sert à ajuster la dette sauf éventuellement dans le cas où les actifs suffisent à payer toute la dette, y compris la dette sans sécurité[37]. Le Chapter 15 s’applique non seulement aux entreprises insolvables, mais aussi à celles qui ont des difficultés financières[38]. L’exigence du contrôle ou de la supervision de la juridiction étrangère est satisfaite par l’autorisation du juge de convoquer les créanciers et de sanctionner le scheme. Le juge vérifie en effet si le processus a été « fair » et « correct »[39], ce qui a satisfait le juge de la faillite du district sud de New York. Ont donc été reconnus plusieurs schemes[40].  Le premier a été adopté par le créancier français Mutuelle du Mans Assurance dans lequel le juge américain considéra que MMA avait son COMI en Angleterre, de telle sorte qu’il s’agissait d’une Foreign Main Proceeding en accordant donc un automatic stay. Le second concernait un scheme mené à Singapour

Les obligations de coopération. Les paragraphes 11 U.S.C. § 1525 et suivants régissent les règles fondamentales de la coopération des tribunaux américains et des praticiens de l’insolvabilité, d’une part, avec des tribunaux étrangers d’autre part. Le 11 U.S.C. § 1525(a) prévoit que, conformément aux lignes générales de la procédure Chapter 15 contenues dans le § 1501, le tribunal américain doit collaborer dans toute la mesure possible, directement ou par l’intermédiaire du mandataire, avec le tribunal étranger et/ou avec le praticien étranger. Pour ce faire, le tribunal peut, en vertu du § 1525(b), communiquer directement avec le tribunal étranger ou le représentant étranger, et demander des informations et de l’assistance. Le 11 U.S.C. § 1526 renferme des dispositions correspondantes pour le praticien ou d’autres représentants nommés par le tribunal. Les formes de coopération sont indiquées au 11 U.S.C. § 1527. Au titre de celui-ci, tous les moyens appropriés peuvent être utilisés, y compris (1) la nomination d’une personne ou institution ainsi que d’un examiner devant assister le tribunal, (2) la transmission d’informations, (3) la coordination et la gestion des biens du débiteur et de ses affaires, (4) la passation et la mise en œuvre de contrats pour la coordination des procédures, (5) la coordination de procédures en instance à l’encontre des biens du débiteur. Si la procédure étrangère est une procédure secondaire, le tribunal doit, avant d’accorder son assistance, s’assurer que les actifs et biens ou le patrimoine objet de la coopération tombent bien dans le champ d’application de la procédure secondaire, 11 U.S.C. § 1529(3). Si plusieurs procédures étrangères sont en instance, l’article 11 U.S.C. § 1530 renvoie aux §§ 1525 à 1527. Ces textes (§§ 1519 et 1521) prévoient que ces mesures concernant une procédure étrangère secondaire ne doivent pas être en contradiction avec la procédure étrangère principale, § 1530(2). Si la reconnaissance d’une procédure étrangère principale est accordée après qu’une procédure étrangère secondaire ait été reconnue ou une demande correspondante déposée, la cohérence des ordonnances déjà rendues le cas échéant en vertu des §§ 1519 et 1521 pour la procédure étrangère principale doit être contrôlée, [§ 1530(2)]. Si deux procédures secondaires sont reconnues en même temps au titre du Chapter 15, le tribunal a une obligation de coordination conformément au § 1530(3).   Le 11 U.S.C. § 305(a) donne au tribunal la possibilité de retirer sa protection. Le tribunal peut, après en avoir informé les créanciers et après une audience, annuler ou suspendre une procédure si le tribunal est amené à penser que l’annulation ou la suspension sert mieux les intérêts des créanciers et du débiteur, ou si une demande de reconnaissance d’une procédure étrangère est déposée et que les fins du Chapter 15 sont mieux servies par l’annulation ou la suspension. Une demande correspondante peut également être déposée par le représentant étranger, § 305(b).

Des procédures européennes sont régulièrement reconnues par les juges américains. Dans l’affaire Jaffé v. Samsung Electronics Co. Ltd.[41], le syndic d’une procédure de faillite allemande d’une société de technologie a obtenu la reconnaissance de la procédure allemande. Par contre, il n’a pas obtenu de droit de demander une protection suffisante telle que prévue à l’article 11 § 1522 (a). En effet, une disposition spéciale du code de faillite américain donne aux titulaires de licence de certains biens intellectuels (y compris les brevets) le droit de maintenir leurs licences, à condition qu’ils continuent à payer le Concédant. Le droit allemand prévoit que les licences de brevet peuvent être rejetées comme d’autres contrats. Le tribunal de faillite américain a conclu que le fait de permettre à un syndic de rejeter les licences « affecterait fortement la protection législative accordée aux titulaires de licences de brevet et partant, porterait atteinte à une politique publique fondamentale aux États-Unis qui consiste à promouvoir l’innovation technologique », et serait manifestement contraire à l’ordre public américain. Il a conclu également qu’une telle mesure empêcherait les titulaires de licence d’obtenir la « protection suffisante » prévue à la section 1522 (a). Dans une autre affaire[42], la Cour d’appel a mis en œuvre la protection des créanciers prévue à la section 1522 à l’encontre d’un débiteur dans le cadre d’une procédure italienne de concordato preventito. La procédure italienne a obtenu sa reconnaissance en tant que procédure principale étrangère, le représentant a demandé une compensation entre (i) la créance de garantie dans un contrat conclu avec une contrepartie américaine (ii) et la dette de responsabilité pour une violation présumée au contrat. Le créancier américain a demandé à ce que soit levée la suspension des poursuites pour pouvoir permettre cette compensation, et le débiteur italien a demandé à ce que le Concordato preventito soit exécuté. Le tribunal a décidé qu’il n’accordera pas le principe de courtoisie à la procédure italienne, car le débiteur italien « a omis de fournir des informations concernant le droit italien et le statut de l’affaire de faillite italienne, où il ne s’est pas acquitté de la charge de la preuve requise en demandant le principe de courtoisie. » Le tribunal a particulièrement fait part de ses préoccupations concernant l’absence de notification du jugement de concordat et du délai de déclaration de créance au créancier américain. Le tribunal a également conclu que « des éléments fondamentaux pour une application régulière de la loi faisaient défaut, et que la protection des intérêts des créanciers n’a pas été assurée. ». Le concordat préventif aurait donc pu être reconnu – il l’a été dans d’autres cas, mais ne l’a pas été dans ce cas-ci pour des raisons concrètes liées à la gestion de la procédure. Le tribunal américain, dans l’affaire SNP Boat Service S.A. v. Hôtel St. James[43] a dû connaître du cas d’une procédure française de sauvegarde. Le débiteur avait obtenu la reconnaissance de la procédure en vertu du Chapter 15 et avait demandé de rapatrier ses biens situés aux États-Unis en France. Un créancier canadien s’y est opposé, déclarant que ses intérêts ne recevraient pas une « protection suffisante » dans la procédure française. Bien que le créancier contestataire soit canadien, la Cour a déclaré que rien ne l’empêchait de s’assurer que les intérêts des créanciers étrangers étaient suffisamment protégés avant de remettre les biens à la juridiction étrangère. Elle a soutenu qu’en déterminant s’il y avait « protection suffisante », le tribunal de faillite n’aurait pas dû demander une communication préalable dans le but de savoir si le créancier avait été traité de manière juste dans la procédure étrangère. Le créancier ne s’est pas plaint du caractère juste de la procédure française de manière générale, et la Cour a déclaré que le fait d’enquêter sur le traitement individuel que recevrait un créancier en France ferait du tribunal américain une cour d’appel jugeant une procédure étrangère. La Cour a refusé d’avoir ce rôle et a conclu : « Un tribunal de faillite n’est pas compétent pour enquêter dans le but de savoir si les intérêts d’un créancier particulier sont suffisamment protégés dans une procédure étrangère spécifique. » Dans l’affaire In re Atlas Shipping A/S[44], le représentant étranger danois a proposé de verser des fonds au Danemark dans une procédure de sauvegarde afin qu’ils y soient répartis. Le tribunal a jugé que dans de telles circonstances, les créanciers seraient « suffisamment protégés » par la procédure danoise. Il a observé que le concept de protection suffisante présentait « trois principes de base : « un traitement juste de tous les titulaires d’une créance contre la masse de la faillite ; une protection des titulaires des créanciers américains contre tout préjudice ou inconvénients survenus dans le traitement des créances dans une procédure [étrangère] ; et une distribution du produit des biens du débiteur substantiellement en accord avec l’ordre prescrit par le droit américain »[45]. Le juge américain vient de reconnaître la sauvegarde financière accélérée française de EUROPCAR après avoir conduit une conciliation et après avoir déposé une sauvegarde accélérée. Le juge américain a reconnu la procédure de sauvegarde accélérée dans l’affaire CGG qui avait été menée sur base d’une conciliation suivie d’une SPA.

Les schemes (section 26)[46]. Sous le Chapter 15, les juges confirmeront cette approche même s’ils ont examiné si la procédure qui leur était soumise visait une société solvable (au sens du critère du (101 (23) qui exige pour le Chapter 15 que la procédure est relative à une insolvabilité ou un ajustement des dettes). Ils ont estimé que lorsqu’un débiteur veut aménager sa dette, c’est pour éviter l’insolvabilité[47]. Le contrôle du tribunal intervenait par le fait que le juge anglais convoque l’audience et surveille la régularité de la réunion[48]. Les juges américains ont admis pour des entités françaises, ou singapouriennes, ou d’autres nationalités[49]. Depuis, de nombreuses procédures de section 26 et même de section 26A (ce qui est plus facile) ont été reconnues comme Virgin Atlantic, DEEP OCEAN, Pizza Express, …

 

[1]http://www.uncitral.org/uncitral/en/uncitral_texts/insolvency/1997Model.html, (dernière consultation le 18 avril 2015).

[2]http://www.uscourts.gov/FederalCourts/Bankruptcy/BankruptcyBasics/Chapter15.aspx (dernière consultation le 18 avril 2015) ; voir également Deutsch,  Douglas E.  “Introduction to Recognition under Chapter 15”, in : American Bankruptcy Institute Journal, Vol. XXIX, No. 4, Mai 2010.

[3] Pour l’histoire législative de la Section 304,. Krause, Stuart A, Jankovsky, Peter, Lebowitz, Marc A. in : Fordham Law Review, Volume 64, 1996, „Relief under Section 304 of Bankruptcy Code: Clarifying the Principal Role of Comity in Transnational Insolvencies”, p. 2591 et suivantes.

[4]http://www.uscourts.gov/FederalCourts/Bankruptcy/BankruptcyBasics/Chapter15.aspx; http://globalinsolvency.com/chapter15 (dernière consultation pour toutes deux le 18 avril 2015).

[5]Ainsi par exemple, une procédure de liquidation australienne a été reconnue (In re Betcorp Ltd., 400 B.R. 266 (Bankr. D. Nev. 2009). Il en est de même pour une procédure de redressement judiciaire australienne, l’argument étant que, dans cette procédure également, les créanciers titulaires de garanties étaient concernés dans leur totalité (In Re ABC Learning Centres Ltd., 728 F.3d 301 (3d Cir. 2013) cert. denied 13-646 2014 WL 684083 (U.S. Feb 24, 2014).

[6] Il fut ainsi considéré suffisant que le débiteur ait payé par virement à son avocat aux É.-U. une avance d’honoraires (In re Octaviar Administration Pty Ltd., No. 14-10438 (SCC) (Bankr. S.D.N.Y. June 19, 2014).

[7] In re Bear Stearns High Grade Sturctured Credit Strategies Master Fund Ltd., 374 B.R. 122, 126 (Bank. S.D.N.Y. 2007); Deutsch, op. cit.

[8] Voir comme plus haut Bear Sterns, note de bas de page 14; In re SPhinX, Ltd., 351 B.R. 103 (Bankr. S.D.N.Y. 2006) ; In re Basis Yield Alpha Fund (Master), 381 aff’g 374 B.R. 122, 130 (Bankr. S.D.N.Y. 20007).

[9] Deutsch, op. cit., renvoi à Bear Stearns, note de bas de page 14; Basis Yield, note de bas de page 15.

[10] Bear Stearns (note de bas de page 14) et Basis Yield (note de bas de page 15).

[11] Bear Stearns (note de bas de page 14), In re Millenium Global Emerging Credit Master Fund Ltd., 458 B.R. 63 (Bankr. S.D.N.Y. 2011).

[12] In re Morning Mist Holdings Ltd., v., Krys ( In re Fairfield Sentry Ltd.), 714 F.3d 127 (2d Cir. 2013).

[13] Deutsch, op. cit., renvoi à In re Ernst & Young, Inc., 383 B.R. 773, 781 (Bankr. D. Colo. 2008) et In re Ephedera Products Liability Litigation, 349 B.R. 333,336 (S.D.N.Y. 2006).

[14] Voir la note de bas de page 21, pour cette décision également Stenshoel, Eric „The Treatment of Intellectual Property Licenses under U.S. Bankruptcy Law“, in : International Corporate Rescue, 2013, p. 41 et suivantes (49f).

[15] In re Toft, 453 B.R. 186 (Bankr. S.D.N.Y. 2011) ; pour cette décision Ma, abi-org blog, http://www.abi.org/blog/chapter-15-does-not-permit-relief-manifestly-contrary-us-public-policy (dernière consultation 26/04/2015) ; Stenshoel, op. cit.

[16] Ma, op. cit., renvoi à Prager v. Toft, [2011] (UK), ECF No. 6, pp. 19-20.

[17] No. 09-14766-RGM, 2009 WL 2210771 (Bankr. E.D. Va. July 16, 2009).

[18] United States International Trade Commission v. Jaffe, 433 B.R. (E.D. Va. 2010).

[19] In re Nortel Networks Corp., 669 F.3d 128 (3d Cir. 2011).

[20] Texte de la décision à l’adresse https://casetext.com/case/in-re-nortel-networks-inc-4 (dernière consultation le 26/04/2015).

[21] Ce règlement a joué un rôle important dans la procédure d’insolvabilité de Ioukos, le tribunal ayant, sur la base du § 1519, décidé de dispositions de soutien de la procédure d’insolvabilité en cours en Russie, sans jamais reconnaître la procédure en vertu du Chapter 15 ; voir Mayr, Kurt A., „A Tale of Two Proceedings: „Turnabout is Fair Play“ in : the Yukos U.S. Bankruptcy Cases“, in : ABI Journal, Vol. XXV, No. 6, July/August 2006.

[22] In re Rede Energia, S. A., 515 B.R. 69 (Bankr. S.D.N.Y. 2014) ; cette décision a fait l’objet de nombreux commentaires aux É.-U., voir Cooper, Richard J.,  Cestero, Francisco L.,  Schweitzer, Lisa M. „S.D.N.Y. Bankruptcy Court Overrules Bondholder Objections to Enforce Brazilian Reorganization Plan“, http://www.insol.org/emailer/Sep_2014_downloads/Bankruptcycourtoverulesbondholderobjections.pdf (dernière consultation le 26/04/2015)¸ Walsh, Abbey „Comity is King: Chapter 15 Lessons from Rede and Vitro“, http://www.law360.com/articles/592495/comity-is-king-chapter-15-lessons-from-rede-and-vitro (dernière consultation le 26/04/2015) ;.

[23] In re Vitro S.A.B. de C.V., 701 F3d. 1031, 1044 n. 42 (5th Cir. 2012); In re Metcalfe & Mansfield Alt. Invs. 421 B.R. 685, 697 (Bankr. S.D.N.Y. 2010).

[24] In re Vitro S.A.B. de C.V., 701 F3d. 1031, 1044 n. 42 (5th Cir. 2012), texte de la décision à l’adresse http://www.leagle.com/decision/InFCO2020121128154 (dernière consultation le 28/04/2015) ; concernant cette décision, voir Nathan, Bruce et Corbi, Richard ”The Fifth Circuit’s Vitro Decision on Cross Border Insolvencies: A Game Changer?”, in : Business Credit March 2013, p. 1 et suivantes, texte à l’adresse https://www.lowenstein.com/files/Publication/3f62a9b2-c460-4170-adba-523f6c9ab4df/Presentation/PublicationAttachment/850a7d58-52c6-49e0-90f9-5be2bbcf70fa/VitroDecision.pdf (dernière consultation le 26/04/2015).

[25] Pour l’exposé des faits Nathan et Corbi, op. cit.

[26] Awal Bank , BSC v. HSBC Bank USA (In re Awal Bank, BSC), 455 B.R. 73 (Bankr. S.D.N.Y. 2011).

[27] Concernant cette décision : Chase, Jacob, “In re Awal Bank: Expanding Ability to Avoid Setoff in Chapter 15 Bankruptcy Cases“ in : St. John’s Bankruptcy Research Library, 2012, Volume IV, No. 8; Corb, Richard J., “Chapter 15 Limits Tested” in : ABI Journal, Vol. XXXI, No. 7, August 2012.

[28] Jaffe v. Samsung Electronics Co. Ltd., 737 F 3d 14, 14 (4th Cir. 2013), texte de la décision à l’adresse : http://www.ca4.uscourts.gov/Opinions/Published/121802.P.pdf (zuletzt eingesehen am 28.04.2015).

[29] Concernant cette procédure : Ray, Kevin P.. „Ch. 15 And Public Policy Lessons From Jaffe v. Samsung”, in : www.law360.com, March 21, 2014, 12:36 a.m. ET (dernière consultation le 28/04/2015).

[30] Voir par exemple Ray, op. cit.

[31] Rejet de la demande de Writ of certiorari le 6 octobre 2014 à l’adresse http://www.supremecourt.gov/orders/courtorders/100614zor.pdf (dernière consultation le 2 mai 2015), cas n° : 13-1324.

[32] 11 USC 1502 (S).

[33] 11 USC §362 et 201-302.

[34] 11 USC §101 (24).

[35] 11 USC §101 (23).

[36] In Re Hopewell 238, BR 1999 at 48-53.

[37] In Re Frankmaster Ltd, BR 1999 627.

[38] Chambre des représentants US, HR rep. N°109-31, p.1.

[39] In Re Hopewell 238 BR 1999 art. 51-52.

[40] In Re Lloyd, 2005, Bank Lexis 2794, in city order case 06-B-10461, SDNY 2006, Giordan order case N°06-11563, SDNY 2006.

[41] Jaffé v. Samsung electronics Co. Ltd., 737 F.3d 14 (4th Cir. 2013), cert. denied, 2014 WL 1807106 (Oct. 6. 2014).

[42] In re Sivec SRL, 476 B.R. 310 (Bankr. E.D. Okla. 2012).

[43] 2012 WL 1355550 (S.D. Fla. April 18, 2012).

[44] 404 B.R. 726 (Bankr. S.D.N.Y. 2009).

[45] 404 B.R. au 740, faisant référence à une affaire en lien avec le paragraphe 304, In re Artimm, 335 B.R. 149, 160 (Bankr. C.D. Cal. 2005).

[46] In Re Hopewell 238, BR 1999.

[47] In Re Frankmaster Ltd 237 BR 627 (1999).

[48] Jeffrey John Lloyd 2005, Brankr., Lexis 2794.

[49] In Re Gardien Case N°06-11563.

 

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